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Un peu de douceur ..
5 avril 2020

Dans les flots tourbillonnants

Bonjour à vous!

dernier épisode de l'histoire de Gránia et Diarmuid (qui a dit OUF ?)

Bonne journée à tous!

 

 

vallee de la Boyne

 

.... Pour fêter cette réconciliation, Gránia et Diarmuid invitèrent Finn et Cormac à un de ces banquets dont les Celtes avaient le secret. La fille de Cormac proposa aux trois hommes, afin de sceller leur amitié retrouvée, d’aller chasser ensemble.

 

C’est ainsi qu’une chasse fut organisée près de Ben Bulben, une gigantesque montagne battue par les vents, vêtue de roches et d’herbe d’un vert éclatant, se dressant majestueusement au-dessus du comté de Sligo et offrant une vue imprenable sur l’océan qui ne cessait de sculpter la côte avec ses vagues. C’est dans ce décor à couper le souffle que surgit le sanglier de notre histoire, et au sujet duquel je suis obligée, pour une meilleure compréhension, de mettre sur pause pour faire une antépénultième parenthèse.

(Le sanglier de cette chasse a ceci de particulier qu’il est la réincarnation du demi-frère adultérin de Diarmuid ; en effet, leur mère ayant trompé Oengus, elle avait eu un deuxième garçon que l’Apollon irlandais avait tué. Mais un druide qui passait par là avait fait renaître le nourrisson mort dans un sanglier sauvage, avec pour geis de tuer Diarmuid quand l’heure de la vengeance serait venue) (Est-ce qu’on raconte cette histoire aux petits Irlandais ? Je m’interroge. Comme je m’interroge sur la douceur des rêves que font nos enfants après qu’on leur ait narré l’histoire de Blanche-Neige et de sa marâtre qui veut lui arracher le cœur ou du Petit Poucet et de l’ogre coupeur de tête...)

Bien. Revenons à nos moutons.

Le frère sous forme de sanglier réapparut donc sur terre pour tuer son aîné qu’il jalousait. Dès le début de la bataille, les chiens s'enfuirent à toutes pattes, terrifiés (c’était de lointains ancêtres de Rantanplan), tandis que les pierres de la fronde de Diarmuid rataient la tête de la bête qui chargeait, que son épée se brisait en deux sur sa couenne et qu’il se retrouvait en deux coups de cuillères à pot sur le sol, perdant tout son sang.

Quel suspense, n’est-il pas ?

Diarmuid, à moitié dans les pommes, supplia Finn de lui apporter un peu d’eau (oui parce que justement, un des geis de Finn était de pouvoir ramener à la vie toute personne à qui il apporterait de l’eau). Par trois fois, le vieux guerrier mit de l’eau du ruisseau dans ses mains jointes en forme de vasque... Et par trois fois, il écarta les doigts pour laisser s’échapper l’eau à quelques centimètres du visage de Diarmuid. Cruel, isn’t it ?

Au quatrième voyage de flotte, fin du suspense, Diarmuid était passé de vie à trépas sans avoir pu revoir Gránia, la mère de sa nombreuse progéniture.

Oengus emmena le corps sans vie de son fils chéri près du fleuve Bóinne où le défunt rejoignit les Tuatha de Dana, c’est-à-dire ceux qui ont quitté le monde visible.

Les guerriers témoins de la vilenie racontèrent partout que Finn s’était conduit comme un bâtard, le comportement déshonorant de leur chef jusque-là admiré. Pour retrouver leur estime, Finn décida de traverser la rivière Bóinne d’un seul bond afin de montrer sa bravoure. Regrettable décision puisqu’il ne s’agissait pas de la Mer Rouge : le vieux chef disparut englouti dans les flots tourbillonnants ...

 FIN

Voilà. Je vous ai tout bien raconté l’histoire d’amour de Gránia et Diarmuid telle qu’elle nous est parvenue au travers des siècles. Mais si je puis me permettre de donner mon avis, je trouve la fin particulièrement nulle.

1) Le beau mec (qui aurait pu encore servir) est bêtement mort de soif.

2) L’héroïne se retrouve avec un tas de marmots qu’elle va devoir élever toute seule sans même l’aide du vieux beau qui a trouvé le moyen d’aller se noyer.

À moins qu’elle se pacse avec la veuve de Finn ?

Ah bah non, suis-je bête, c'est sa sœur !

Encore que. J'ai vécu à plusieurs reprises avec ma soeur, on se marrait bien...

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5 avril 2020

Cette chanson sauvage

Bonjour à vous!

Voici l'avant-dernier épisode de l'histoire irlandaise. Quel suspens, isn't it?

Je vous souhaite une bonne lecture, et une bonne journée!

 

125974331

© Pastelle

 

Vous vous doutez bien que lorsque l’effet du sortilège se fut dissous et que Finn se réveilla, il entra dans une rage terrible. On entendait ses hurlements dans tout le comté. "Vengeance ! Vengeance !" criait-il en tapant son torse avec ses poings (thème repris quelques siècles plus tard par Patti Smith).

Cormac, le roi d’Irlande et père de Gránia, se trouva fort contrit : il connaissait le foutu caractère de sa fille et savait que rien ne pourrait la faire changer d’avis. Finn comptait sur la Fianna pour traquer le jeune couple mais les guerriers, ne trouvant pas assez stylé de se battre pour une histoire de jalousie, rendirent leur tablier et Finn dut engager des mercenaires.

Pendant ce temps, inconscients des fâcheux conflits que leur fuite avait générés, Gránia et Diarmuid avaient entrepris de se connaître. 

C’est ainsi que quand Diarmuid ne bataillait pas avec les hommes de Finn, les vainquant tous à chaque fois tellement il était fort et surtout aidé par Oengus Mac Og (rappel : le dieu de l’Amour, et accessoirement son père) qui le protégeait à l’aide d’une cape d’invisibilité (ce qui, il faut bien le reconnaître, devait être coton pour les adversaires), il testait avec Gránia, dans la position de la chandelle ou de la brouette, à l’orée des clairières et dans les grottes, sur des lits de mousse ou de bruyère, les soixante-quatre positions du Kāmasūtra.

L’amour était-il ce lent, long, profond supplice dont ils eussent voulu qu’il durât toujours tout en exigeant son couronnement ? Cette flamme qui, à la fois les consumait tout en leur permettant de renaître ?

Était-ce elle qui implorait ? Était-ce lui qui refusait de faire grâce?

Sontaient-ce eux, cette chanson sauvage ?

Toujours est-il qu’ils se retrouvèrent inconsidérément avec une cinquaine d’enfants, car il arrive que ceci entraînât cela. C’est la raison pour laquelle on trouve en Irlande maints endroits - monticules de terre, cercles de pierres, menhirs isolés, grottes – qui portent le nom de Leaba Dhiarmada agus Gránia (le lit de Diarmuid et Gránia).

Ainsi s’écoulèrent sept années, jusqu’à ce qu’un jour, las du tracas de la traque, Diarmuid construisit une hutte avec des branches et des racines, entourée d’une palissade faite en bois de peuplier, afin de se poser quelques temps. Las ! Ils furent découverts et aussitôt dénoncés à Finn Mac Cool, qui s’empressa de prendre la route de la vengeance.

Dans un rugissement, tel un taureau géant, Finn chargea. Les deux hommes se battirent, frappant, esquivant, se blessant mutuellement jusqu’à ce que le chef des Fianna trébuchât. Diarmuid lui arracha sa lance des mains et si fort le frappa-t-il que le géant s’effondra. Quand il heurta le sol, le choc fut si terrible que les pommes de chaque arbre d’Irlande et les baies de chaque buisson chutèrent dans un fracas épouvantable.

Pendant que se déroulait cette lutte d’une rare violence, Oengus avait emporté Gránia, flanquée des fruits de ses amours avec Diarmuid, dans ses virils bras divins. Il les avait mis à l’abri en une verte vallée traversée par une rivière, et qui avait nom Brú na Bóinne. C’est là que Diarmuid les rejoignit au terme de la bataille après avoir mis son adversaire KO. Le couple s’installa dans la vallée de Tara [à 40 kms de Dublin qui n’existait pas encore], résidence en cette lointaine époque des ard ri Érenn, les Hauts-Rois d’Irlande.

Un jour, las de cette interminable querelle qui troublait la quiétude du royaume d’Irlande, Oengus alla trouver Finn pour lui demander de faire la paix. Le vieil homme était las, las, si las qu’il accepta. Dans la foulée il se résigna à épouser une autre fille du roi qui saurait adoucir ses vieux jours (la fille, pas le roi).

Pour fêter cette réconciliation, Gránia et Diarmuid invitèrent Finn et Cormac à un de ces banquets dont les Celtes avaient le secret. La fille de Cormac proposa aux trois hommes, afin de sceller leur amitié retrouvée, d’aller chasser ensemble...

5 avril 2020

La porte secrète de mon jardin

Pour ceux qui le veulent, la suite de ma petite histoire irlandaise, et pour tous, une très jolie fin de dimanche.

Smouiiiiiiiiiiiiiiiiich!

 

6 oct 2012 Violaine

© illustration: Pastelle

 

En cette douce nuit du IIIe siècle de notre ère, on fête et on ripaille : Finn, le chef des Fianna, s’apprête à prendre pour épouse Gránia, la plus belle fille d’Irlande. Seulement voilà : ce projet n’a pas l’heur de séduire le cœur de la belle, aussi attend-elle que Finn et ses hommes eussent bien mangé et bien bu pour ordonner à sa servante de remplir la plus grande meidir (coupe à boire) de vin et la lui apporter. La fille obéit et Gránia, qui était un peu magicienne à ses heures perdues, jeta un sort sur la coupe, ce que dans la mythologie celte on appelle un geis (*). Il y avait quatre poignées sur ces coupes carrées et Gránia en offrit une à Finn, qui s’en saisit et but goulûment avant de la rendre à sa future (qui n’allait pas tarder à être sa passée), laquelle la remit au suivant, etc.

Un par un, les buveurs s’endormirent, jusqu’à ce que la coupe arrive à Diarmuid. Avant que ses lèvres n’atteignissent la meidir, Gránia attira son visage à elle pour l’embrasser. Quid ? Veni vedi embrassi ? se demanda Diarmuid en celte. Il était ‘achement embêté. Sa nounou l’avait bien mis en garde, ce genre de femme est un loup pour l’homme, la fable bien connue de la nana qui titille le petit Jedi du mec puis le laisse tomber comme une vieille chaussette, la meuf sur laquelle tout glisse, émotions et sentiments, laissant le pauvre keum avec le cœur en charpie.

En plus, trahir son chef et oncle en lui piquant sa dulcinée ? Bon, ok, la fille était drôlement ban tentante ! Sans parler de la fameuse tache rouge sur son front qui attirait à lui les femmes comme des mouches, ce qui n’arrangeait pas ses affaires ! And last but not least, ne s’était-il pas engagé, au cours des longs et nombreux rites d’initiation pour devenir Fénnid (singulier de Fianna), à ne jamais refuser les demandes d’une femme? Pour couronner le tout, son abruti de cerveau n’avait pas l’air hostile à l’idée de lui faire des choses même pas répertoriées dans le Kāmasūtra. Quant à ses émotions, elles couraient derrière pour rattraper tout son sang resté coagulé au niveau des reins. Bon sang, pourquoi les y mêler ? Pourquoi hésiter ? Oscar Wilde n’affirmerait-il pas des siècles plus tard que "la meilleure façon de résister à la tentation c’est d’y céder" ? Qui était-il pour le contredire ? Alors hein, Diarmuid n’avait pas des masses de choix !

"Que l’on me réveillât de ce cauchemar ! Que je redescendisse sur terre promptement !" se dit-il dans un dernier éclair de lucidité en s’envoyant une lampée d’irish whiskey, ce qui lui donna la force d’avancer comme pâle prétexte que puisque Finn était endormi, toutes les portes de la forteresse seraient fermées et bien gardées.

"Pas la petite porte secrète de mon jardin", rétorqua Gránia avec un clin d’œil qui ne lui dit rien qui vaille.

Alors, la main sur le front, il puisa en lui toute l’énergie dont il était capable et accepta de se sacrifier.

C’est ainsi qu’ils surgirent hors de la nuit et coururent vers l’aventure au galop..

 

 

(*) Le geis était une incantation magique pratiquée par les druides à la naissance/et ou au cours de la vie des futurs guerriers et rois. Ces geisa (pluriel de geis) consistaient en des obligations et interdits à respecter (un peu comme le code d’honneur du chevalier au Moyen Âge). Au cours de sa vie, si le guerrier faisait n’importe quoi au lieu de suivre ses geisa (sans h), à cause par exemple d’un sortilège jeté par une fée (les fées ont toujours été des êtres très taquins), il perdait son honneur (grave) ou même sa vie (définitif) ; il mourrait alors dans d’atroces souffrances. Comme l’on voit, la vie n’était pas rose tous les jours, mais il fallait bien inventer de saines occupations en ces temps reculés où la télé n’existait pas encore.

Justement, le geis de Diarmuid met en scène un sanglier (je vous dis que cette histoire aurait été digne d’une BD d’Astérix !), chose que je me propose de vous narrer dans le prochain épisode..

1 avril 2020

Rouge comme les baies du sorbier magique

... En cette nuit d’octobre qui donnait à la belle un visage un peu blême, le roi Ailil n’eut plus aucun doute : il était face à Áine, la reine des fées, celle-là même qui avait jeté son dévolu sur Finn Mac Cool (la Chaussée des Géants, formée de quarante mille colonnes tombant en cascade dans la mer d’Irlande, cela vous dit quelque chose ? Eh bien c’est Finn le géant ! On raconte dans les chaumières d’Antrim qu’un jour que sa mère se moquait de sa lenteur à créer sa chaussée, il l’a changée en rocher ! Mauvais caractère, le Finn !).

Mais, approchez, approchez, je vous en prie..

falaise (1)

 

Ce que je vais vous raconter s’est déroulé il y a bien longtemps, au troisième siècle de notre ère, en un lieu aux falaises d’or bleu, aux verts si éclatants, à la nature si fascinante, qu’on l’a surnommé l’île d’émeraude. Voyez-vous défiler devant vos yeux ébaubis ce ruban sans fin de prairies où paissent de paisibles moutons, vaches et chevaux ? Ici vivaient nos lointains cousins celtes les Gaëls, jamais conquis, jamais romanisés, dignes de figurer dans la BD d’Astérix !

Dans cette île magnifique vivait un homme d’une grande beauté (en même temps s’il avait été moche et couard ça aurait beaucoup moins d’intérêt). Cet homme répondait au nom imprononçable de Diarmuid O’Duibhne, parvenu jusqu'à nous avec la pudique traduction de "Didier à la tache d’amour rouge comme les baies du sorbier magique" (*). C'était le fils d’Oengus Mac Og, l’Apollon irlandais, que pour plus de sûreté, son équivalent mortel Donn fit à sa femme par une nuit de pleine lune.

C’était aussi le neveu de Finn Mac Cool cité plus haut (Finn signifie "blond", en référence à ses cheveux qui, en fait, étaient carrément blancs, du fait de son grand âge).

Grand, Finn l’était vraiment puisque c’était un géant. Du clan des Fianna, il se trouva fort dépourvu lorsque sa femme trépassa, tant il est vrai que de tout temps les hommes n’ont jamais pu se passer de nous. Il se mit donc en demeure de dénicher jeune et nouvelle épouse.

(*) (Un jour que Diarmuid O’Duibhne chassait avec trois de ses compagnons, ils trouvèrent refuge pour la nuit chez un vieil homme, dans une cabane au fond des bois. Au moment où les quatre jeunes gens se retirèrent, la superbe fille de leur hôte se glissa dans leur chambre (tout le monde est beau en Irlande, surtout les femmes, c’est consternant). Je jette un voile pudique sur ce qu’ils firent à cinq dans la chambre. Toujours est-il que le plus vaillant des quatre fut Diarmuid, comme en témoigne le ball seirce (grain de beauté) que la belle, qui en fait était une fée, lui colla sur le front en signe du fait qu’aucune femme ne lui résisterait jamais...)

Fin de la parenthèse et revenons à notre géant.

Le choix de Finn se porta sur Gránia (prononcez [grœgnɔ]), la plus belle femme qu’on eût jamais vue dans toute l’Irlande. Or, on le sait, dans la vie il n’y a que la beauté qui compte, le reste chaut peu, c’est pour ça que plus personne ne se marie et que la planète se dépeuple à une vitesse vertigineuse. C’est un problème grave dont personne ne parle et c’est un scandale.

Mais pardon. Je m’égare.

Gránia donc, en plus d’être super belle, était fille du Haut-Roi Cormac McAirt, ce qui prouve une fois de plus à quel point la vie peut être injuste. Cormac accepta de donner la main de sa fille, seulement voilà, Gránia n’ayant pas spécialement de goût pour le troisième âge (voire quatrième, à partir d’un moment on ne sait plus trop), elle défia Finn de lui apporter un couple de chacun des animaux vivant sur la belle terre d’Irlande en espérant bien que le Finn tomberait le bec dans l’eau. Mais la pauvre était bien jeune et innocente : elle ne savait pas comme c’est fou ce que les hommes sont capables de faire pour mettre une femme dans leur lit trouver une compagne !

Sitôt demandé sitôt fait : Finn, aidé de son neveu Diarmuid à la Tache Rouge déposa aux pieds de la princesse les gages demandés, ce qui permit à la jeune fille de découvrir le teint de lait de Diarmuid, ses joues délicatement ombrées de duvet viril, les prunelles de ses yeux telles deux gouttes de miel séminal, ses cheveux comme si un peintre avait, d’un coup de pinceau, étalé un ciel nocturne projetant de multiples clartés célestes retombant en boucles fauves sur sa nuque, etc, etc.

Son cœur fit boum boum crac, exactement comme quand on se retrouve coi devant une œuvre d’art. Rien à voir avec le Finn aux cheveux blancs, ridé comme une vieille pomme. Gránia, la bouche grande ouverte et la mâchoire prête à tomber par terre, sut immédiatement que ce gars-là ressemblait comme deux gouttes d’eau à la prochaine chose qu’elle allait déguster regretter.

Seulement voilà : elle avait donné sa parole et déjà, les festivités commençaient pour célébrer son futur mariage...

30 mars 2020

Là-haut sur la colline

Cette semaine, Le Goût nous suggère de parler de la liberté, de l’évasion.

J’ai cherché ce que je pourrais bien vous proposer. Je me suis finalement arrêtée sur une histoire qui, à défaut d’être totalement dans le sujet (chassez le naturel..), présente l’avantage d’avoir quelques rebondissements. Si ça vous plaît, cela va donc nous occuper toute la semaine ! (je précise que c’est une histoire hautement véridique ! D'ailleurs, tout ce que j’écris est toujours absolument vrai !)

Je vous souhaite une bonne lecture et une belle journée !

Ouaf ! (Ça, c’est pour Narco !)

rousse robe

Il y a très longtemps vivait dans la lointaine Irlande une très belle et très rousse reine guerrière qui répondait au doux nom de Mebd (Maëva en langue moderne), nom qui signifie "ivresse". L’ivresse, Mebd en effet était prompte à en jouir, que ce soit d'alcool, au combat ou tout endroit où elle pouvait s’abreuver de mâles. Pour tout dire, Mebd est l’exemple le plus abouti de la souveraineté féminine absolue. Autour d’elle gravitait un nombre impressionnant d’amants, ce qui donne une petite idée du statut qu’avait la Femme chez les Celtes, et on ne peut que regretter que l’homme actuel n’ait pas hérité de leur lucidité et de leur perspicuité.

Un jour que Mebd se promenait dans les montagnes galloises, elle s’arrêta pour brosser ses longs cheveux (oui, en plus d’être super belle, elle avait de beaux cheveux longs) lorsque soudain, elle vit quelque chose bouger dans les buissons. Elle se pencha avec grâce (non contente d’avoir une chevelure de feu elle était aussi gracieuse : le monde est d’une injustice !) et vit que c’était un homme. Justement, elle commençait à être lasse de ses trois maris qu’elle avait d’ailleurs épuisés, aussi entreprit-elle de séduire ce pourvoyeur potentiel de sensualité qui répondait au nom d’Ailil et dont elle fit son quatrième mari. (En fait, il suffisait qu’elle regarde un homme pour qu’il ait envie de lui sauter dessus, ce qui était quand même, il faut bien le reconnaître, drôlement plus efficace que de s’inscrire sur Adopteunmec).

Pendant que se déroulaient ces événements d’une sensualité inouïe, régnait un peu plus au nord un certain Fergus Mac Roeg, géant de son état dont on disait qu’il était aussi fort que sept cent hommes, ce qui fait quand même beaucoup. Ses repas se composaient de sept bœufs et de sept porcs et il lui fallait sept femmes tous les soirs, vu que ses attributs virils avaient, disait-on, la taille de sacs de farine (je n’aurais pas aimé être à la place d’une de ses femmes).

À la suite d’une bataille amicale dont les Celtes avaient le secret, Fergus dut s’exiler et les pas de son cheval le portèrent chez le roi Ailil et la reine Mebd. Vous devinez la suite ? C’est bien ça : par une belle nuit de Samaïn, Fergus devint l’amant de la reine qui avait un sens aigu de l’hospitalité, sens qui n’eut pas l’heur de plaire à Ailil (les maris je vous jure, quels rabat-oij !).

Dans un accès incompréhensible de jalousie, il fit zigouiller Fergus par ses hommes  – enfin quand je dis ses hommes, ça devait plutôt être son armée : pour un géant flanqué de deux sacs de farine il a sûrement fallu ça !

Après quoi, épuisé par toutes ces émotions, Ailil alla siffler là-haut sur la colline afin de méditer sur les malheurs de sa vie. Or, comme je l’ai précisé, ces événements d’une violence extrême se déroulaient pendant la nuit de Samain, autrement dit le moment le plus terrible de l’année, celui où commence la saison sombre et où les portes du monde des morts s’ouvrent pour laisser libre accès aux fées et aux sorcières.

Aglagla.

C’est ainsi que devant les yeux estomaqués d’Ailil apparût en cette funeste nuit une femme d’une blondeur extraordinaire, munie d’une harpe dont les notes l’invitaient à monter direct au septième ciel. Ailil ne se sentit plus de joie : en trois secondes il ressemblait au loup de Tex Avery langue dépliée, ouvrant et fermant les yeux pour trouver la force qui était en lui. Las ! Ce n’était qu’un faible mâle, et plutôt que de supputer des débordements innommables où la belle serait à sa merci, où sa prosopopée aurait dépassé ses pensées, où son corps, lourd comme un cheval mort .. Bref, comme fou le roi se saisit de sa lance pour en transpercer la jeune fille (c’est une image, hein, je ne voudrais pas heurter mon lectorat fidèle en lui assenant des scènes trop crues), lorsque d’un seul coup, la délicate jeune fille se transforma en une espèce de géante (magnifique, certes, mais vraiment très très grande) entourée d’une fulgurante et éblouissante lumière.

"Crois-tu vraiment pouvoir me transpercer de ton dard ? Stupide mortel, ne m’as-tu donc pas reconnue ?"

Derrière l’immense et lumineuse créature babillaient des oiseaux échappés de l’histoire de Blanche-Neige. Et, en cette dernière nuit d’octobre qui donnait à la belle un visage un peu blême, le roi Ailil n’eut plus aucun doute : il était face à Áine, la reine des fées, la déesse de l’Amour et de la clarté du soleil ...

 

À suivre..

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4 mars 2020

Le Salomon des Francs

Bonjour à vous,

j’ai toujours adoré raconter des histoires, et c’est ce que je vous propose aujourd’hui.

N’hésitez pas à me dire si vous aimez et si vous en voulez d’autres!

Je vous souhaite une très belle journée !

Dagobert

Chers amis,

je comprends votre désarroi, que dis-je, votre désarroi ? votre détresse, à vous qui vîntes de tous les coins de France et de Navarre pour savoir si Dago la portait à l'envers, et qui pour toute réponse vous heurtâtes à un silence vertigineux.

On se moque de nous à la fin ! Remboursez !

Mes amis, mes amies, du calme : l'heure de la vérité a enfin sonné. Vous croyiiez jusqu’alors (puisqu’on vous l’a pernicieusement fait croire) que ce bon vieux Dagobert était tellement distrait qu’il se prenait les pieds dans les tapis et chutait, sous les regards ahuris de ses sujets, emberlificoté dans ses braies enfilées à la va-vite. Eh bien c’est vrai. Mais pas parce que c’était un Pierre Richard de l’an 700. Non-non : Dagobert était un Don Juan et passait sa vie à se déshabiller et à se rhabiller n’importe comment.

Je sais : ça fait mal d’apprendre ça.

Que je vous narre la chose par son début.

Tout commença un beau jour de 603 à Clipiacus (Clichy), avec la naissance d'un petit être fragile et chou que son papa, le trop célèbre Clotaire II (fils des non moins célèbres Chilpéric et Frédégonde) appela Dagobert, ce qui signifie "grand jour", tellement il était content que la Providence lui accordât encore un héritier pour ses vieux jours, vu qu’il avait zigouillé tous les précédents (ceci dit, Dagobert portait bien son nom, car - Dieu soit loué - il n’avait pas grand-chose à voir avec ses terrifiants aïeux, puisque lui, lorsque par un pur hasard son frère Charibert est mort en 632, il a juste fait assassiner son neveu, mais c’était dans un noble but de conciliation : éviter un nouveau partage) (vous vous rappelez que chez les Francs, au contraire des Bourbons et autres Valois beaucoup plus tard, le royaume était censé être partagé en parts égales entre tous les fils) (tradition à laquelle, entre parenthèses, Dagobert est le premier à ne pas se soumettre, comme on va le voir pas plus tard que tout de suite - et là, on peut dire que c’était un précurseur, et pas seulement en matière de mode vestimentaire).

Quand Dago eût atteint l’âge vénérable de quinze ans, son père qui n'était toujours pas mort décida de l’associer au pouvoir royal afin de pouvoir se la couler douce entre les bras de la jeune et sublime dernière arrivée dans son harem, à savoir Sichilde. Comme Clotaire avait finalement un bon fond malgré tout ce qu’on a raconté à son sujet, il décide de faire profiter son fils de l’aubaine et lui colle dans les bras la sœur de Sichilde, Gomatrude, en lui sommant de l’épouser.

Mais Dago n’est pas dupe : ce n’est pas une vulgaire femelle qui va lui faire oublier que son père ne lui a refilé qu’un tout petit bout de l’Austrasie. S’ensuit une joyeuse joute verbale dont les Francs ont le secret, au terme de laquelle Dagobert récupère la Champagne et la Brie. 

Quant à la pauvre Gomatrude, elle ne fait pas long feu dans la couche royale puisqu’à peine quelques mois s’écoulent avant que le roi d’Austrasie ne croise la route de la douce Nanthilde, ce qui fait qu’aussi sec il répudie Goma.

Il faut dire que, tout comme les femmes romaines, les femmes franques étaient si peu de choses .. On les épouse, on les viole, on les répudie, on se demande même si elles ont une âme ..

À Clipiacus, Dagobert et Nanthilde, s’étant aimés tout l’été, se trouvèrent fort dépourvus quand la bise fut venue : pas l’espoir du moindre petit Dago en vue, malgré toute l’énergie qu’ils mettaient à l’ouvrage. Or, le roi allait sur ses trente ans, autant dire qu’il avait déjà un pied dans la tombe. Il lui fallait un héritier, et vite.

C’est comme ça que - uniquement par devoir - il se résolut à chercher une autre femme. Comme les filles du palais n’avaient pas été renouvellées depuis son mariage avec Nanthilde et qu’il les avait déjà toutes mises dans son lit du temps de Gomatrude, il entreprit de faire un petit voyage de prospection dans la région d’Augustomagus (Senlis), où les femmes avaient la réputation d‘être belles et ardentes. Naturellement, il emmena Nanthilde avec lui car il la savait de goût très sûr.

Nanthilde n’était pas une nounouille comme Gomatrude : elle n‘embêta pas Dago avec une bête jalousie déplacée, ce qui lui permit de rester dans la place quand le roi jeta son dévolu sur la charmante Ragnétrude qui lui donna un fils (Sigebert) en 631.

Pour fêter cet heureux événement, il prit une nouvelle concubine du nom de Wulfgunde, laissant Ragnétrude pleurer dans les bras de la reine Nanthilde.

S’ensuivit de la part de Dagobert une frénésie amoureuse qui lui valut le surnom de "Salomon des Francs". Exit le grand roi qui avait gouverné pendant quinze ans, entouré d’excellents conseillers comme le bon Saint Éloi qui remettait tout à l’endroit, exit le souverain qui avait assuré la soumission absolue de son royaume et dont le prestige était tel qu’aucun roi des Francs ne l’égala plus jusqu’à l’avénement de Pépin le Bref...

Si bien que, miné et affaibli par toutes ses orgies, Dago s’éteint à trente-six ans, complètement rétamé. On l’inhume selon ses vœux dans la basilique de St Denis (à sa suite, l‘abbaye accueillera la quasi-totalité des rois de France). 

tombe Dagobert

 

Mais je vous vois déjà vous agiter : St Denis ? Quid St Denis ?

Eh bien voilà. Un jour, Dago fut atteint de lèpre. Il se dit comme ça : je vais aller faire un petit pèlerinage pour demander à Dieu de me débarrasser de cette cochonnerie. Et il emmena une de ses femm sa femme pour le soutenir dans cette rebutante mission. Ils s’arrêtèrent en chemin et s’étendirent sur un pré fleuri pour y batifol dormir. Cela se passait à Catulliacum (St Denis). Au réveil, le contact de sa peau avec la rosée avait rendu saine une partie de son corps. Du coup il y vit comme un signe divin et s’immergea complètement dans l’herbe fleurie, toujours en compagnie de sa belle (c’est de là, d’ailleurs, qu’il prit l’habitude de faire des pèlerinages dans les buissons avec une personne du sexe opposé : pour remercier le Seigneur).

Et c’est comme ça qu’il fonda l’abbaye de St Denis sur le lieu du miracle..

27 février 2020

Super svelte

ND 6-5-2008 (1)

photo: moi

mai 2008

C’est fou comme un détail peut changer la couleur d’une journée ! Détail qui revêt – excusez du peu - l’apparence d’une jolie aquarelle réalisée par Marie à mon unique attention. (Je tremble rétrospectivement à l’idée que sa grande Dame ait failli finir en confettis au fond d’une corbeille – c’est en tout cas l’idée saugrenue qui a perturbé l’esprit de Marie lorsqu’elle s’est aperçue que le bleu de son ciel devenait vert au contact de l’écru. Comme si le bleu ne devenait jamais vert ! Ce sont bien là des réflexions d’artiste ! Mais ouf ! Son cerveau a de nouveau été irrigué normalement et Marie a remis l’enveloppe à l’employée de la poste (ce qui prouve qu’il existe encore des employées de la poste dans les postes, ce qui est une sacrée bonne nouvelle), à la suite de quoi j’ai trouvé, le matin du 25 février, ladite enveloppe au fond de ma boîte aux lettres, atterrie là selon le procédé habituel mis au point par mon facteur (lancer du courrier au petit bonheur la chance et sans quitter sa mobylette, ce qui occasionne parfois quelques surprises).

Revenons à Notre Dame.

J’ai cherché quelles paroles je pouvais bien mettre sur une aussi jolie musique.

Tout d’abord, j’ai songé à vous raconter ma première fois. La première fois où je suis allée voir Notre Dame, bien sûr ! À quoi d’autre pensiez-vous, bande de coquins ?

Puis une étincelle a zébré mon esprit embrumé du matin, sous la forme du premier texte que j’avais écrit à l’intention de ma fille aînée lorsqu’elle m’avait supplié à genoux de lui donner des cours d’histoire, au prétexte fallacieux qu’elle avait toujours cru que le Tiercé était la partie de la société française qui, sous l’Ancien régime, n’appartenait ni à la Noblesse, ni au Clergé, et le Patois une des provinces récupérées par Louis XIV en même temps que le Roussillon.

C’est donc ce que je livre à vos yeux ébaubis, en vous souhaitant pour la rime un bon jeudi !

Notre-Dame de Paris-sketch Marie K

© Marie K

 

Nos ancêtres les Gaulois n'avaient peur que d’une chose : que le ciel leur tombe sur la tête. Finalement ce sont les Romains qui leur sont tombés dessus, à une période où Lutecia, comme l’appelait Jules, n’était encore qu’une île reliée par deux vétustes ponts de bois, habitée par une modeste peuplade de Gaulois celtes, lesquels, hormis leur jeu préféré qui consistait à se massacrer entre eux, vivaient du fleuve - raison pour laquelle ils s'appelaient les Parisii, ce qui veut dire pêcheurs en gaulois (du reste, c’est ce nom qui restera à notre capitale, ainsi que le bateau dans les armes de la ville et la devise "Fluctuat nec mergitur").

En trois siècles, les Romains vont y construire des marchés, des temples, des ponts plus solides et des rues bien droites, tracées selon un quadrillage conforme aux règles de l'urbanisme militaire en vigueur dans les camps romains, effaçant toute trace de l‘îlot que fut notre capitale à leur arrivée en Gaule..

En l’an 451 de notre ère, Attila, saisi d'un brusque désir de tourisme dynamique, rapplique de sa Tartarie natale avec ses hordes, passe le Rhin, met tout à feu et à sang dans les provinces du Nord et marche droit sur la vallée de la Sequana (Seine). Panique générale chez les Parisii ! Heureusement, Geneviève est là !!

Mais qui est Geneviève ?

Eh bien c'est une jeune fille de vingt-huit ans, pas encore sainte, mais déjà très pieuse. En effet, dès l’âge de sept ans elle se fait remarquer par Germain, l'évêque d'Auxerre qui, la trouvant en prière dans l'église de Nanterre, ville où elle est née, pose ses mains sur la petite et déclare : "Ne la contrariez pas, car, ou je me trompe bien, ou cette enfant sera grande devant Dieu."

Tellement grande devant Dieu qu’à quinze ans, Geneviève prend le voile des vierges. À l'époque, les monastères de femmes n’existent pas, et celles qui souhaitent se consacrer au Seigneur continuent à vivre dans le monde, simplement distinguées par le voile de leur consécration. C’est ce qui se passe pour Geneviève qui, à la mort de ses parents, vient habiter à Lutecia chez sa marraine. Geneviève vit de silence, de prière et de mortification, ne se nourrissant que deux fois par semaine (raison pour laquelle elle est super svelte, d‘après les quelques témoignages en notre possession).

Mais revenons à nos Huns, ou plutôt à nos Parisii. S'ils n'avaient peur que d'une chose (que le ciel leur tombe sur la tête), ils voyaient néanmoins avec un enthousiasme plus que mitigé le désherbage prématuré de la région. C'est pour ça qu'à cette annonce ils n'ont qu'une hâte : déguerpir au plus vite. C'est là que Geneviève s'exclame : "Ne partez pas !! Lutecia est protégée par le Christ et échappera au carnage !".

Taratata !! Les hommes, terrorisés (ce ne sont que des hommes !) restent sur leur idée : prendre courageusement leurs jambes à leur cou, non sans avoir au préalable jeté dans la Sequana cette espèce de folle qui leur suggère de rester pour se faire massacrer (ils songent même, par précaution, à la lapider avant).

Geneviève alors se tourne vers les femmes qui comme toujours, sont les seules à ne pas paniquer pour trois fois rien, et avec elles s'en vient prier dans une église (église située très précisément à l'endroit où se dresse l'actuelle Notre-Dame).

Sur ces entrefaites, surgit l'archidiacre d’Auxerre qui clame de sa virile voix : "Parisii !! Celle que vous voulez tuer est une sainte ! Obéissez-lui !" 

Une sainte ?? Veni vedi sainti ??

Du coup, les mâles Parisii ne savent plus que faire. Vaquer ? Lapider ?? Big dilemme. Finalement, ils se disent que l’archidiacre est un homme, comme eux, et décident donc de lui faire confiance et d’attendre l’arrivée d’Attila ..

Qui n’a pas lieu, comme l’a prédit Geneviève.

En effet, piqué par on ne sait quelle mouche, le célèbre Tartare, suivi de sa meute, se détourne brusquement de Lutecia pour aller désherber Cenabum (Orléans) qu'il assiège (finalement, les Huns seront repoussés et vaincus lors d‘une bataille à grand spectacle, avec des fleuves de sang, aux Champs Catalauniques, ce qui prouve que la civilisation triomphe toujours).

Hourra!!! Hourra !!!! hurlent les Parisii [comme si c’était eux qui avaient fait tout le boulot !]. Et ils proclament Geneviève leur sainte patronne, oubliant complètement que trois secondes avant ils voulaient la noyer.

(Pour la p'tite histoire, trente ans plus tard, elle remettra ça avec les Francs. Geneviève, cette fois, sauvera la ville de la famine en organisant une expédition ingénieuse au moyen de bateaux qui, par la Sequana, iront chercher le ravitaillement jusqu'en Champagne. D’ailleurs, Clovis en fera toute une montagne (la Montagne Sainte-Geneviève). Quant Geneviève mourra, en 512, à l’âge très vénérable de quatre-vingt-neuf ans, Clovis y fera construire une église, qui abritera son tombeau (à Geneviève) ainsi que le sien et celui de sa femme (à Clovis) (et c’est à ce même endroit qu’Abélard commencera à enseigner au XIe siècle)).

Voilà.

Avant de le donner à ma grande, j’avais demandé à mon fils, alors adolescent, de lire ce texte pour savoir s’il était clair, et de me dire ce qu’il en avait retenu.

Réponse : Sainte Geneviève était super svelte..

8 octobre 2019

Le plus beau joyau de ma couronne

Suite de l’histoire d’hier,

pour Heure Bleue, Adrienne, Le Goût, Délia, Marie, Alain [le vase de Soissons, c’était avant !], Bourlingueuse [exact ! elle est devenue Sainte Radegonde !] et Émilia, et pour ceux qui auront envie de la lire, bien sûr !

 

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Par une nuit sans lune, disais-je, le petit groupe de femmes embarque sur un frêle esquif qui glisse silencieusement sur les eaux. Mais les fugitives naviguent dans la mauvaise direction, se rapprochant involontairement de celui qu’elles fuient: le cruel Clotaire. C'est comme ça que s'achève la folle escapade.

Puisque la future reine est à Soissons, Clotaire décide de l’y rejoindre pour y célébrer le mariage. Radegonde continue de faire du zèle en refusant de vêtir les atours de son rang.

C’est donc dans une robe de bure, telle Jeanne d’Arc au bûcher, que la future reine mérovingienne est unie de force à Clotaire. Pour fêter ça, elle se met au pain sec : qu’on distribue ses plats aux pauvres!

Bien qu’elle soit encore très pure, Radegonde sent qu’il y a quelque chose de peu convenable dans les regards que lui porte son époux quand le soir vient. Aussi, une fois les assauts passés, s’agenouille-t-elle sur la pierre nue et froide la nuit, pour chanter des psaumes, ou se relève-t-elle pour s’étendre en prière jusqu’à en geler. Ce qui a le don de contrarier Clotaire.

"Quel gâchis ! Un si joli lot !!"

Dégoûté que Radegonde fasse passer Dieu avant lui, Clotaire essaie de l’amadouer en lui faisant des cadeaux. Elle en profite pour réclamer sa clémence vis-à-vis des condamnés à mort...

Vous rappelez-vous que c’est Clotaire qui a tué toute la famille de Radegonde alors qu’elle n’était qu’une enfant ? Le vase déborde avec un nouvel acte de cruauté qui lui ferme à jamais son cœur: l’assassinat de son frère Hermanfried. Cette fois, la reine explose de colère et de douleur.

Clotaire de son côté en a ras-le-bol d’être un incompris et se demande ce qu’il a encore fait?

Il chasse sa femme en espérant qu’elle lui reviendra plus soumise et plus gaie. 

L’occasion est trop belle : accompagnée de ses femmes et d’Agnès, une jeune fille qui lui est particulièrement attachée, elle va à Noyon pour s’y faire moinette. Cela fait, il lui faut fuir la colère de l’homme qu’elle outrage comme roi et comme époux. Avec la confiance que donne la foi, elle gagne Orléans, s’embarque sur la Loire, et arrive à Tours, où dans un des nombreux asiles ouverts près du tombeau de saint Martin, elle se met à écrire au roi. Comme elle n’a peur de rien, elle lui demande qu’il accepte de se séparer à l’amiable. Elle lui fait cadeau de tous les meubles, qu’il garde tout mais qu’il lui lâche la grappe !

Le vil Clotaire ne l’entend pas de cette oreille : il dirige sa fureur contre les évêques, dont il exige qu’ils attestent la nullité des vœux de la reine. Mais la peur du pouvoir des femmes consacrées à Dieu le retient : il menace mais ne fait rien.

Des mois s’écoulent, puis des années. Radegonde, d’asile en asile, mène une vie vouée à la prière. Dure envers elle-même, portant des cilices et jeûnant fréquemment, elle emploie son temps à soulager la souffrance des autres. Elle s'occupe des malades, fait leur toilette, lave leur linge. Aucune tâche ne la rebute. Elle fait installer un lieu spécial pour les lépreux, qu'elle soigne et réconforte, qu’elle embrasse, même, pour leur procurer de l’affection, alors que ses compagnes s'en écartent, terrorisées. Elle distribue si largement les biens qu'elle possède (*) qu'on s’étonne que la source n'en soit pas encore tarie. La réputation de sa bonté, de sa sainteté même, se répand au loin.

Un jour, cette sérénité est brisée: Clotaire veut la reprendre! Radegonde prend aussitôt la fuite, accompagnée d'Agnès et de Disciola. C'est là que se produit ce qui a traversé les siècles sous le nom de "miracle des avoines" : en sortant de Saix, elle dit à un paysan semant de l'avoine : "Mon ami, si aucun te demande si tu as vu passer par ici quelque personne, réponds fermement que ni homme ni femme n'y est passé". Au même moment, le grain à peine semé se met à croître, permettant aux trois femmes de s’y cacher. Clotaire arrive, questionne le paysan qui fait celui qui n’a rien vu.

Dans sa cervelle épaisse de roi franc peu habitué à réfléchir, la réponse du manant chemine lentement, de circonvolution en circonvolution, jusqu’à un endroit plus aéré où elle s’épanouit quelque peu. Clotaire comprend alors que s’obstiner à prendre de force une religieuse, fut-elle sa femme, constitue un délit sérieux. Aussi s'en retourne-t-il sans autre forme de procès.

C’est un miracle !

Mais Radegonde a eu si peur qu’elle décide de s’éloigner encore, et elle part en direction de la mer, vers Poitiers, où elle se rend à l’asile de saint Hilaire. Là seulement Clotaire reconnaît sa consécration et l’autorise à bâtir un monastère. Elle peut enfin mettre son pouvoir au service du peuple, bien plus grand sans doute qu’elle ne l’eût conservé à la cour barbare du roi.

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(*) Chez les Francs, il est d’usage que l’épouse reçoive un don de son mari le lendemain de son mariage, don qu’on appelle morghen-gabe, présent du matin. Selon cet usage apporté de Germanie en Gaule, Radegonde, dépouillée de tout dans son pays par Clotaire, a reçu de lui un riche don du matin qu’elle consacre à la fondation de son monastère. Mais une fois tout réglé, son humilité l’empêche de garder le rang de supérieure. Elle fait nommer abbesse Agnès, cette jeune gauloise qu’elle aime depuis son enfance, et qui, de la cour, l’a suivie à Noyon, de Noyon à Tours, et de Tours à Poitiers.

Cela fait, Radegonde redevient simple religieuse, partage les travaux, balaie, sert à la cuisine, porte le bois et l’eau, garde le silence, et trouve délicieux tous ces exercices. Ainsi la fille du roi de Thuringe ne conserve, du triple caractère de reine, de fondatrice et de supérieure, que l’ascendant que lui donnent sa bonté et son amour pour les autres.

Presque tout ce que les Gaules renferment encore de familles nobles fournit au monastère de Poitiers des religieuses heureuses de vivre auprès d’une telle femme. Poitiers voit aussi venir les filles de rois victimes des crimes de leurs pères [comme Galswinthe, persécutée par Frédégonde, dont parlait justement Le Goût hier].

À la mort de Clotaire en 561, Radegonde, première femme "faiseuse de paix" de tous les temps, réussit le tour de force d’accorder entre eux Chilpéric, Sigebert, Caribert et Gontran, les fils de son mari, "afin", dit-elle, "que la patrie ne périsse pas". 

Le 13 août 587, Radegonde rend son âme à Dieu. On dit que peu de temps avant, un homme jeune et merveilleusement beau est venu lui rendre visite: "Pourquoi, enflammée de désirs, me pries-tu avec tant de larmes? Pourquoi te répands-tu en supplications et t'infliges-tu de si cruelles tortures, pour moi qui suis toujours près de toi? Tu es une pierre précieuse, un des plus beaux joyaux de ma couronne."

On dit aussi qu’il s’agit de Jésus et que l'empreinte de son pied est encore dans la pierre ...

25 novembre 2018

Cette mâle terreur

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Cétait il y a très longtemps (ça doit être mon côté Cancer qui fait ça, j’ai toujours aimé les choses d’il y a très longtemps.. Ma mère disait toujours que je ne suis pas née à la bonne époque, que j’aurais dû naître super avant, genre à l’époque des preux chevaliers, moi j’aurais été une princesse et on se serait battus pour mes beaux zyeux, tout ça. Sauf que si c’est ma nature profonde d’aimer ce qu’il se passe avant, ben ma mère de l’époque des chevaliers elle m’aurait dit que j’aurais dû naître au temps des Cro-magnons.. et ainsi de suite).

Bref.

Donc, c'était un temps d’il y a très longtemps. À cette époque, on ne croyait pas à la logique linéaire, binaire et dualiste. D’ailleurs, on ne croyait pas à la logique du tout. Avant tout, c'était un monde organique, dans lequel les événements étaient liés entre eux. La destinée humaine ne se trouvait pas dans la libération, mais dans la liberté, celle qui n'a que faire de comprendre la vie mais qui permet de s’initier à elle. En ces temps anciens, pas de certitudes philosophiques : seulement des relativités s’exprimant par le sacré et la poésie, par des correspondances secrètes entre des mondes magiques. L’éveil de la conscience ne se faisait pas par la pensée, parce que la vie et le rêve appartenaient au même monde.

Approchez-vous, je vous en prie, approchez-vous de ce monde. Vous y verrez des hommes et des femmes en train de célébrer Lug, l’époux de la déesse Brigit, ce même Dieu qui a donné son nom  à la ville de Lyon (entre autre) dont la Fête des Lumières qui perdure de nos jours trouve là son origine.

Voyez les hommes, avec leurs pantalons étroits et collants que les Romains appelleront des bracca  (braies). Des guêtres de tissu sont fixées au bas de leurs jambes et couvrent leurs gallicae (sandales). Sur le torse, ils portent un gilet serré recouvert d'une blouse. Chez certains, cette saie est rayée, sur d’autres elle est en tissu de laine unie ou bien à carreaux. Elle est ajustée à la taille par une ceinture, avec ou sans manches (les Romains appellent celles avec manches palla gallica).

Les femmes, elles, portent une tunique serrée qui s’enfile par la tête, sans ceinture si elle est longue et avec si elle est courte, parfois plissée, ce qui lui donne de l’ampleur. Ornée de franges ou de dentelures en bas, doublée de laine ou de fourrure qui dépasse sur les bords, la tunique a des manches collantes jusqu'aux poignets. Elles se portent souvent par deux, superposées, la plus longue sert alors de lingerie de corps.

Comme elles sont belles ces femmes, dont les plus jeunes en toges immaculées suivent les druides et les bardes, portant avec préciosité les plantes rituelles et sacrées que sont le blé et la bruyère.

Grande divinité celtique omniprésente en Gaule, Lug est le dieu de la synthèse: il vient du passé, du présent et du futur, il est issu du monde de l'esprit et du monde de la matière, il est le fils de la lumière et des ténèbres, du ciel et de la terre, de la vie et de la mort. C’est pourquoi le jour où on le fête est aussi l’occasion de célébrer les mariages, qui en ces temps sensés sont une institution souple, un contrat dont la durée n'est pas forcément définitive. La femme choisit librement son époux et en se mariant, elle n’entre jamais dans la famille de ce dernier, elle appartient toujours à sa famille d'origine, le prix versé par le mari pour l'achat de sa femme n'étant qu'une compensation donnée à la famille de celle-ci. D’ailleurs, en cas de divorce, elle retourne dans sa famille d'origine (divorce qui se fait par consentement mutuel, sauf en cas de maltraitance de la femme par son époux - la séparation chez les Gaulois n'est qu'un contrat qui cesse).

Du reste, pour eux, se marier n’est pas une obligation. Ils peuvent aussi vivre dans une sorte de concubinat, néanmoins réglementé par des règles strictes - par exemple, si l’homme est déjà marié il ne peut prendre une concubine qu'avec l'accord de sa légitime.

Eh oui, le mariage gaulois ne s'embarrasse pas de cérémonies rigides et compliquées. Seules les convenances d'âge, de naissance et de rang sont respectées. Les jeunes gens jouissent de la plus grande liberté et les jeunes filles, nubiles dès 14 ans, disposent elles-mêmes de leur main. Ses parents accordent l'entrée de la maison à tous ceux qui la veulent pour femme, et lorsque son inclination est confirmée, elle leur en fait part.
Le jour de Lug, ils invitent tous les soupirants à un banquet. Avant le repas, la jeune fille présente aux convives un baquet d'eau pour se laver. Celui auquel elle le présente en premier est celui qu'elle a choisi. 

Oui, contrairement à leurs consoeurs romaine et grecque, les Gauloises ont la vie belle. De plus, elles participent activement aux actes de guerre. Armées d'épées et de haches, elles se jettent tout à la fois sur l'ennemi romain et sur le fuyard gaulois pour l'obliger à se battre.

Le courage de la femme celte est également attesté par des histoires de femmes employées aux champs et qui ne s'interrompent que quelques minutes dans leur travail pour aller... accoucher.

Contrairement aux Romaines qui n’ont aucun droit de cité, les Gauloises, en plus, participent aux affaires publiques. Les Latins s'étonnent d’ailleurs de la place occupée par les femmes, que ce soit chez les Gaulois ou dans la plupart des peuples dits "barbares". Lors de leur conquête des Gaules, les armées romaines seront surprises de rencontrer des peuplades celtiques dirigées par des femmes.

Le seul point noir de ce tableau idyllique se situe dans le cadre de la vie privée, où la femme dépend totalement de son homme (époux, père), qui a le pouvoir absolu sur elle. Une manière, on va dire, de canaliser l’angoisse masculine vis-à-vis de la puissance que la Femme incarne, notamment celle de donner la vie. Car pour les Celtes, et toutes leurs traditions le disent, la Femme est la déesse, l’initiatrice, la messagère des Dieux, celle qui introduit l’homme dans le monde des Réalités Supérieures.

C’est cette mâle terreur associée aux conséquences de la conquête de la Gaule par Rome qui va entraîner la perte de ce statut pour les femmes, la disparition du sentiment d'admiration sans limite et d'adoration qu'on avait alors pour elles. La conversion des Gallo-Romains au christianisme va les enfermer dans un rôle dont elles mettront plus de deux mille ans à ressortir ..

À en ressortir? .... Vraiment?

22 septembre 2018

Les pas japonais

Spéciale dédicace à LadyObi ✿◠‿◠)˙·٠•●♥

 

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La fabrication par ma sœur de dalles de jardin - les dernières en date : des "pas japonais" - m’a donné envie d’en savoir plus sur cet art. En fait, contrairement à ce que l’on croit peut-être, confectionner un jardin à la japonaise ou ratisser des mers de gravier n’est pas une invention des moines bouddhistes zen, c’est l’inverse : c’est en créant ces jardins selon les préceptes anciens que les moines zen ont trouvé un moyen de parvenir à l'Éveil (en japonais et en chinois , ce qui tend à prouver que l’Éveil est universel). Eh oui ! pratiquer le jardinage en lui donnant une dimension spirituelle et en l'utilisant comme support de méditation, c'est possible ! Si ça tombe, en posant ses "pas" dans son allée, ma soeur ne s'est même pas rendu compte qu'elle méditait !

En fait, à l'origine, l'art des jardins japonais est un culte Shinto, la religion la plus ancienne du Japon, bien antérieure au bouddhisme, laquelle repose sur des concepts super chouettes comme l'harmonie entre l'homme et la nature (pour une meilleure communication entre l'un et l'autre, les Japs ont inventé les kamis (), qui sont des genres d'esprits célestes et accessoirement terrestres ayant des pouvoirs variés).

Il y a paraît-il huit millions de kamis au Japon, rien que ça !!! En fait il existe des kamis pour quasi tout (par exemple les kamis du peigne, du crachat, et même des excréments)(i’sont fous ces Japs !).

Mais (Dieu soit loué) il y en a aussi des super chouettes comme:

- Izanami, le kami de la première femme,

- Amaterasu, celui de la déesse du soleil,

- Inari, le dieu du riz (pour le dieu du haricot vert, je n'ai rien trouvé)

- ou encore, ma préférée, Ame no uzume, la déesse de la gaieté.

Oui alors, pour en revenir à l'art du jardinage nippon, il s'agit pourrait-on dire de retrouver la joie qu'on éprouvait, enfant, chaque fois qu'on utilisait nos mains pour découvrir le monde. Car qu'est-ce que nos mains, si ce n'est le premier mécanisme de connexion à la vie, les instruments qui nous permettent d'exprimer notre créativité et notre originalité ?? Chaque fois que nous utilisons nos mains, nous nous reconnectons à notre monde intérieur, ce monde où, en chacun de nous, il y a une inspiration, une spontanéité créatrice, un élan vital, quelque chose, quoi !!! Et ce quelque chose est à nous, tout à nous, rien qu'à nous !! personne ne nous l'enseigne, c'est un présent, un talent unique !!! Il est quelque part dans l’harmonie de ce qui a été, de ce qui est, de ce qui sera, il suffit de laisser faire, d'écouter, de ressentir, jusqu'à ce que dans notre élan, nous fassions partie d'un Tout jusqu'à appartenir au Tout ! C'est fou, je vous jure, c'est fou !!!

Oui bon. Où en étais-je ?

Ah oui. Les "pas japonais".

Oui donc, au tout début (Xe siècle), on cherchait à reproduire dans les jardins un paysage naturel jusque dans ses moindres détails afin de sublimer la beauté de la nature. Deux siècles plus tard est apparu le Bouddhisme Zen qui enseigne avec une logique très particulière que la réalité des choses tient toute entière dans leur vacuité. Tout cela contrarie fort les artistes es-jardinage. Comment vont-ils bien pouvoir représenter la vacuité de la réalité? Apparaissent alors des trucs épurés où les îles et les pièces d'eau sont remplacées par du sable blanc et des pierres, le vide étant propice à la méditation, comme l'on sait.

Tout l'art consiste à donner aux pierres une impression de légèreté, comme si elles flottaient au-dessus du sol, telles de riantes gazelles.

Alors pour savoir si vos pierres sont bien disposées, je vous recommande de les faire arpenter par votre meilleur ami les yeux fermés. S'il se rétame, c'est qu'elles étaient mal disposées, mais comme c'est votre meilleur ami, il ne vous en tiendra pas rigueur (c'est même la raison pour laquelle c'est par lui qu'il faut les faire tester).

Si personne ne tombe, bingo ! Tel le ver à soie blotti dans sa chrysalide, vous pouvez vous dire que vous êtes en train de muter vers quelque chose de beau et de super doué.

NB À l'heure actuelle, je suis bien obligée d'admettre que ma propre mutation n'est pas terminée, surtout en ce qui concerne le domaine culinaire. Croyez bien que je le regrette et que vous serez les premiers informés de toute progression dans ce domaine (mais il reste du boulot).

(- ̮-)
                         .__/l\__. ॐ  Namaskar

25 août 2018

Comme une femme

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"Eh bien tu m'apprends que Gandhi avait une femme et je dois avouer que je n'en savais rien."

Ainsi s'exprimait Lady Obi en cette pluvieuse fin de matinée.

Eh oui! Si personne ne peut rester insensible à ce que fût Gandhi ni à l’action qu’il a menée, il est impossible de parler de Gandhi sans parler de Kasturba, sa femme (कस्तुर्ब en hindi).

Vous savez peut-être que dans l’Inde du XIXe siècle – et encore aujourd’hui, d’ailleurs – les femmes sont considérées "inférieures" à l’homme. C’est la réalité indienne : leur société ressemble un peu à ce que fut celle de nos parents dans les années 50-60 (et avant), c’est-à-dire que c'est l’homme qui détient toute l'autorité (morale, économique, etc). Toute petite, la fillette est formée par sa mère à son futur rôle d’épouse soumise. Elle fait des tâches serviles et s'occupe des enfants cadets. Comme l’amour physique de la chanson de Birkin et Gainsbourg, c’est "sans issue", ou plutôt si, il n'y en a qu'une : se marier, ou plus exactement être mariée, puisque les mariages sont arrangés par les parents, et cela a toujours court même si c’est interdit depuis longtemps.

Oui donc, être une fille est une calamité, et en avoir une tout autant. D’ailleurs il y a énormément d’avortements dès lors que l’on sait par l’échographie qu’on attend une petite fille – bilan, il y a de moins en moins de femmes en Inde. Et ça se comprend ! Pour peu que la femme ne soit pas assez jolie, ait la peau trop sombre, ait été mal "dressée" par les siens, elle subit un véritable enfer : maltraitée, avilie, quand on ne l’arrose pas d’essence pour la brûler vive ! On entend régulièrement parler de ce genre de choses. Mais bon, ce ne sont que des femmes .. Et même pas de chez nous !

Il y a quand même une lueur dans cette vie de rêve : le statut de la femme change sensiblement lorsqu'elle donne un fils à son mari (ben oui, ce serait vraiment dommage qu’une telle lignée d’hommes s’éteigne !).

Donc, Kasturba, la femme de Gandhi, était maltraitée par son mari, ou plus exactement, elle était traitée comme une femme : elle lui servait de bonniche et il la frappait quand il jugeait qu'elle ne filait pas assez doux. Dans sa jeunesse, rien ne laissait prévoir que la "grande âme" en deviendrait une. Rajoutez à cela que c’était un chaud lapin, chose que Kasturba endurait sans piper mot (il allait souvent voir ailleurs si l’herbe était plus verte - on le sait, le changement d’herbage réjouit les veaux).

Certes, la sexualité de Gandhi a fait des remous, surtout avec la sortie d’un bouquin sur le sujet. Ceci dit, loin de moi la prétention de vouloir commenter l’intimité de ce grand homme. Ce que j’ai compris c’est qu’à un moment donné, Gandhi s’est imposé l’abstinence, ainsi qu’à tous ceux qui partageaient son ashram, parce qu’elle lui semblait indissociable d’un certain niveau de spiritualité. Autrement dit, ses désirs charnels lui pourrissaient l’existence et l’empêchaient de se consacrer aux choses sérieuses.

Pour en revenir à la "grande âme", selon moi, c’était elle, Kasturba, en tout cas au début. Elle possédait une force incroyable : elle se soumettait à son mari non pas parce que le contexte social l’exigeait, mais parce qu’elle acceptait son époux tel qu’il était. Avec amour, autrement dit.

Les femmes ont une capacité d'amour infini. Même sous les coups, les insultes, même devant ses colères – et elles étaient nombreuses – Kasturba restait digne. Elle ne se sentait pas coupable de Dieu sait quoi, elle savait très bien qu’elle n’avait rien fait de "mal", ou que si "mal" il y avait, il venait de l’attitude de Mohandas qui pétait les plombs pour n’importe quoi. Et que ce n’est certainement pas en jouant les lavettes apeurées qu’elle lui montrerait qu’il faisait fausse route.

C’est en observant sa femme que Gandhi a pris conscience de sa valeur, de sa force, puis de celles de toutes les femmes. C’est en observant sa femme qu’il a su convaincre les hommes de sa génération que les femmes, toutes les femmes, sont leurs égales et qu'ils ne peuvent rien faire de valable sans elles. C’est grâce à Kasturba qu’il a incité ses congénères à ne plus considérer leurs femmes comme des objets de plaisir, pas même comme des mères ou des épouses mais comme des êtres à part entière, tout simplement. S'est imposée petit à petit à lui l’idée que ce sont les femmes, bien plus que les hommes, qui peuvent comprendre que la liberté ne peut venir que par l'amour. "C'est sur les genoux des femmes que repose l'avenir de l'Inde. Pour ne pas s'anéantir, le monde devra s'orienter vers la non-violence et les femmes doivent être les pionnières de l'ère de la non-violence" a dit Gandhi.

C’est comme ça qu'il a entrepris une véritable révolution : l'amour, le dévouement et l'esprit de sacrifice que les femmes consacraient jusqu'alors uniquement à leur époux, il leur a appris à les faire rayonner au sein de toute la communauté indienne. Pour le suivre, celles qu'il appelait "la meilleure moitié de l'humanité" se sont enrôlées dans des campagnes contre l'alcoolisme, se sont mises par millions à filer et à tisser le coton, militant au péril de leur vie contre les abus des lois britanniques. Elles sont devenues les plus vaillants soldats non-violents de l’armée de Gandhi. Rien au monde n'était plus faible et plus démunie qu'une femme indienne, et pourtant, Kasturba en tête, les femmes l’ont soutenu, humblement et aveuglément, même si elles n’ont pas toujours compris les enjeux du Mahatma dans sa marche inlassable vers la liberté.

Gandhi Kasturba

C’est ma femme qui m’a enseigné la non-violence lorsque j’ai essayé de la plier à ma volonté. Sa résistance obstinée à ma volonté d‘une part, et sa tranquille soumission à la souffrance que lui infligeait ma stupidité d’autre part ont fait que finalement j’ai eu honte, et que j’ai été guéri de ma stupidité à croire que j’avais de naissance le droit de la dominer. Et finalement elle est devenue mon professeur de non-violence.

Mohandas Karamchand GANDHI (1869-1948)

22 juin 2018

Une petite orange

Le texte que je vous propose ce matin, je l'ai écrit pour Saby. J'en profite pour préciser, Saby, que je n'ai rien inventé du tout. C'est une histoire parfaitement authentique et hautement historique, comme tout ce que j'écris.rire

Je vous souhaite une bonne lecture.

 

Aujourd’hui, je vous invite à faire un petit tour en Italie. Suivez-moi, je vous prie.

Nous voici sur la place Pietro d’Illiria. Vous tournez le dos à la via Santa Sabina, ce qui fait que vous regardez vers l’église. À votre droite s’ouvre la grille d’accès au parc Savello. Allons-y, si vous le voulez bien : après avoir franchi la grille, gagnons le fond de ce petit jardin d’où s’étend une vue magnifique sur Rome, avec ses collines et les nombreuses tours et coupoles de ses églises. À vos pieds coule le Tibre, et juste en face de vous, de l’autre côté du fleuve, s’étend le très populaire quartier de Trastévère, transtevere, "au-delà du Tibre".

Maintenant, retournez-vous: dans toute sa majesté se dévoile à vos yeux ébaubis la magnifique église du 4ème siècle qu’est Santa Sabina. Sentez-vous cette bonne odeur d’orangers ? Le premier oranger de la colline a été planté dans le cloître par saint Dominique, dans la cour de l’église. Le voyez-vous ? Pas saint Dominique, voyons ! Je parle de l’oranger venu d'Espagne, son pays natal. On dit que ses fruits sont miraculeux. N’est-ce pas la réalité, que de pouvoir croquer dans cet agrume à la couleur d’or, avec le jus qui vous coule sur le menton ?

Mais revenons à l’Aventin. C’est sur cette colline que se trouvait la maison de la matrone romaine Sabina. Dans ce cuore verde d'Italia, le Tibre traverse des paysages qui semblent sortis d’un tableau de la Renaissance. Sabina y aurait sans doute vécu une vie sans histoire si elle ne s’était pas convertie au christianisme. Pourtant, elle était mariée, c’est-à-dire qu’elle avait atteint le but ultime de toute Romaine, le mariage étant en cette lointaine époque la seule raison de vivre des femmes, en particulier de ces pauvres Romaines qui avaient tout juste le droit de respirer (et encore : avec l’autorisation de leur mari).

C’est ainsi qu’après la mort de la vierge Sérapie (Chrétienne, elle aussi) qui eut la tête tranchée (eh oui, ça ne rigolait pas, dans l’antiquité) (ce n’est pas de nos jours que l’on verrait autant de barbarie, n’est-il pas ?), la très noble veuve Sabina (en plus, elle était devenue veuve ! Quel gâchis !) fut dénoncée au préfet Helpidius pour avoir enseveli décemment Sérapie, sa servante.

Interrogeons notre journaliste sur place (par commodité je vous transmets l’échange directement en français) : 
(le préfet) N'es-tu pas Sabine, la veuve de l'illustre Valentin?
(Sabina) C'est moi-même. 
(le préfet) Pourquoi donc as-tu osé te joindre aux Chrétiens et refusé d'adorer les dieux? 
(Sabina) Je rends grâce à Jésus-Christ Notre-Seigneur qui a daigné, par sa servante Sérapie, me délivrer de la puissance du démon, afin que je ne tombe plus dans l'erreur où vous êtes en l'adorant.
(le préfet) Ainsi tu prétends que les dieux que nous adorons, nous et les augustes, nos souverains, sont des démons! 
(Sabina) Ah ! Combien je voudrais vous voir adorer le Dieu véritable qui a créé toutes choses et qui gouverne à son gré les êtres visibles et invisibles, au lieu d'adorer les statues des démons avec lesquels vous brûlerez, vos empereurs et vous, dans des feux éternels !
(le préfet) Je jure que je vais te condamner sans retard à la peine du glaive. 
(Sabina) Je ne sacrifierai point à tes démons, car le Christ est mon Dieu, je l'adore et je le sers : à lui seul je dois sacrifier.
(le préfet) Nous ordonnons que Sabine, en punition de sa désobéissance aux dieux et de ses blasphèmes contre nos maîtres les augustes, soit frappée du glaive et tous ses biens confisqués !

Après que le bourreau eût fait son oeuvre, des Chrétiens enlevèrent le corps de la noble Romaine et l'ensevelirent dans le tombeau qui déjà gardait les restes de sainte Sérapie.

Ce n’est qu’ensuite, en 425, qu’un prêtre d'Illyrie, nommé Pierre, bâtit une église dédiée à sainte Sabine sur le lieu du supplice.

Voilà voilà...

Une petite orange, peut-être ?

 

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dessin : moi

 

2 décembre 2017

Réconciliation

Ma grand-mère n’a pas toujours été une grand-mère. À quinze ans, c’était une pure blonde à la peau diaphane avec de grands yeux azur. Des yeux de myope. Ce sont les plus doux, m’a-t-on souvent dit. Surtout que ma Mamy était bien trop coquette pour accepter de poser sur son adorable petit nez les affreuses binocles de l’époque!

Quinze ans, donc. Et cet air que certains ados d’aujourd’hui arborent à grand renfort d’extasy, ma Mamy l’avait naturellement: regard rêveur, transparent, pailleté d’étoiles. Seulement voilà, ce beau petit bout de nana habitait la région parisienne, c’est-à-dire à plus de deux-cent kilomètres de son prince charmant.

Par chance, le destin s’en est mêlé. Des volontaires pour un atelier de cheminots, sis dans le Pas-de-Calais? Allez zou! Toute la famille, les parents, les sept enfants, les deux chiens, la tatie - veuve d’un Comte de Brunswick, s’il vous plaît - vient s’installer à deux pas du destin et de ma conception à venir.

Prenez maintenant le Don Juan du coin. Dix-sept ans, le cheveu noir, hérité d’une lointaine, mais noble, cousine basque, l’œil de braise, le menton fier, un je ne sais quoi d’altier dans le port de tête, dans l’allure. Le genre de celui qui a gagné le gros lot à la loterie génétique. Tous les attributs que l’on croyait morts avec Arthur et les Chevaliers de la Table Ronde, mon futur grand-père les a. Que dire encore ? Qu’il est loyal, franc et courageux, qu'en toutes circonstances il va droit au but. Un homme qui ne s’embarrasse pas de fioritures, et qui même s’amuse à surprendre, voire à choquer : vous aurez une petite idée de l’homme que fut mon grand-père. Impulsif, impatient, ses colères sont pourtant vite oubliées. Oui, mon grand-père est tout, sauf ennuyeux. Certes, ma grand-mère en fera les frais, car en amour, il aime POUR LA VIE, seulement voilà, il aime souvent ..

Voyons la suite.

Très simplement. Au cours d’un bal. Bien sûr, comme ma Mamy n’a pas encore 15 ans, son grand frère la chaperonne.. (si par extraordinaire, un jeune me lisait, je précise que ce verbe désuet n’a que peu de rapport avec le Chaperon Rouge). Il faut croire que des obligations l’ont appelé ailleurs, le grand frère, parce qu’aussi sec, mes futurs grands-parents se connaissent (au sens biblique, veux-je dire). Et se mettent à ne plus voyager que sur une mer de phéromones. C’est ma grand-mère, surtout, qui n’arrive plus à atterrir. Genre de petite nana à avoir avalé le résumé de Roméo et Juliette. Le bout de ses doigts, de son cœur, de son esprit, la moelle de ses os semblent complètement imprégnés de lui. Il est sa première et sa dernière pensée de la journée. Tu me manques, lui dit-elle avec des cœurs dans les yeux. Je meurs d’impatience de te voir. Quand est-ce qu’on se voit? Bientôt? N’importe quand! Est-ce que je t’ai déjà dit que tu me manques?

Et le grand frère, me direz-vous? Eh bien le grand frère, voyez-vous, s’est lui aussi trouvé une princesse. Alors pour la surveillance, il y a eu comme qui dirait du laisser-aller.. Si bien que ce qui devait arriver arriva, sous forme de menstruatum interruptus merdouilloum ...

Du jour au lendemain, les valises sous les yeux de ma Mamy ressemblent aux autoroutes qui ne sont pas encore construites dans le coin.

Maria, la mère de ma Mamy, est du genre pragmatique. Elle attrape sa blondinette par la main et va aussi sec exprimer ses revendications matrimoniales aux pieds d’Olympe, ma future arrière-grand-mère (j’avoue, rien que son nom fait frémir !!).

Olympe éclate de rire, dévoilant une quantité phénoménale de dents. Comme elle parlait chtimi, la traduction approximative donne ceci : "Min garchon est trop jeune pour se marier, il doit vivre sô vie! J’ai lôché min coq, fallô rintrer vos poules!"

Et elle conclut l’entretien par un sourire rectangulaire.

Ma petite Mamy s’effondre dans un torrent de larmes. Elles lui sortent par les yeux, par le nez, par les oreilles (si,si !). En quelques jours, sa petite vie proprette est transformée en un diagramme de Venn, avec des cercles et des flèches dans tous les sens.

Mais bon hein. Des milliers de femmes accouchent tous les jours, ça ne doit pas être si terrible que ça ! Une de ces choses dont on se fait tout un monde, mais dont on finit bien par en voir le bout (un peu comme la grosse lessive au lavoir dans l’eau glacée !).

Bien, bien. Ma Mamy s’y est donc collée. Surtout qu’au terme des neuf mois réglementaires (enfin, huit pour ce qui concerne son premier-né), il a bien fallu qu’elle s’y colle. C’est comme ça que mon papa est venu au monde, pas franchement, franchement désiré.

Du coup, enfant, il en a cultivé comme un ressentiment. Solitaire et studieux, il s’enfermait avec ses cahiers très bien tenus, ses stylos à encre de diverses couleurs, qu’il remplissait dans de petites bouteilles Waterman, ses petits soldats de plomb et ses livres écrit en vieil allemand (avec lesquels, plus tard, il m’a fait apprendre cette langue).

Mon père n’a jamais su parler ses sentiments, mais il parlait très bien le piano. Le piano était sa respiration, sa voix, son évasion. Il déroulait les touches du clavier comme la brodeuse les vingt-six lettres de l’alphabet au point de croix.

La colère, les genoux tremblants, la gorge sèche, et le piano devenait son exutoire, son punching-ball. Enfin il s’abandonnait, enfin il lâchait prise. Il se mettait à son piano et le piano venait à lui, comme une grâce tombée du ciel, qu’il ne cherchait pas, n’attendait pas, ne méritait pas, mais qui le surprenait toujours. Son piano était le rayon de soleil qui le consolait de ses colères, l’ami qui le touchait en plein cœur quand il était triste. Son seul ami à vrai dire..

Lorsque nous étions petits, mon père jouait du piano tous les dimanches. Et je ne peux plus en entendre sans frissonner..

 

1957-Nad 2 ans piano

le piano de mon père et moi

 11 mai 2007

25 novembre 2017

Du lait dans les veines

Spéciale dédicace à Vi revolte et à Cath

 

bleu

 

En l’an 290 de notre ère, Constus, un puissant et noble seigneur d’Alexandrie en Égypte, fit à sa femme une petite fille au teint si clair et aux yeux si bleus qu’il la prénomma Catherine, ce qui en grec signifie "pure". Après quoi, épuisé par tant d’efforts, il mourut.

Catherine grandit en grâce et en beauté, car en effet elle était fort belle, et beaucoup de garçons voulaient la mettre dans leur lit, mais Catherine envoyait chacun de ses prétendants sur les roses, parce qu'elle, ce qu’elle voulait, c’était un homme qui les surpasserait tous en sagesse, richesse, noblesse, délicatesse, et surtout, en prouesses gentillesse. Seulement voilà, c'est vilain d’être trop gourmande, comme son avenir ne va pas tarder à le lui montrer.

La mère de Catherine, soucieuse d’avoir une fille aussi exigeante, l’envoie se faire gourmander par un saint ascète qui vit dans une grotte. Cet homme a converti la mère de Catherine au Christianisme alors que Catherine en est encore aux belles histoires racontées par les bardes, le culte des saisons, des orgies en plein air de la fécondité, des ancêtres et toutes ces sortes de choses.

Au cours de leur entretien ponctué de quelques thés sans sucre, le saint homme parle à Catherine de Celui dont la beauté surpasse celle du soleil et de la lune. "Il règne", lui dit-il, "sur toute la création et sa sagesse n’a pas de limites ! Il est le plus beau des hommes !"

"Chance !" se dit Catherine, "l’homme idéal n’est pas mort !".

Et lorsque, avant qu’elle parte, le saint homme lui remet une icône de Marie avec Jésus, Catherine se dépêche de rentrer chez elle et de prier Marie pour qu’Elle lui donne son fils pour époux. La sainte Mère de Dieu sort de ses gonds et lui tient à peu près ce langage : "Tu pries, j'en suis fort aise! Eh bien, patiente, maintenant !"

Catherine perplexe reprend le chemin de la grotte pour demander conseil au vieil ascète qui, aussi sec, la plonge dans un petit rû qui passait par là afin de la baptiser.

La nuit suivante, Jésus en personne se manifeste auprès de Catherine. Cette fois, il l’accepte comme fiancée, mais lui fait jurer de ne pas accepter d’autre époux sur terre (ce qu’elle n’avait de toutes façons pas l’intention de faire, tellement elle le trouve super beau et merveilleux (et superbeau, je l'ai dit?)).

Un jour, l’empereur Maximinus qui régnait alors au nom de Rome sur Alexandrie, organise une grande fête païenne à laquelle Catherine est conviée, puisqu’elle est, comme dit plus haut, de famille noble.

Lorsque Maximinus voit cette fille sublime, il manque en renverser son verre de vin au miel et se retrouve vite tout congestionné. Quand il retrouve la parole, c’est pour demander à Catherine si elle veut l'épouser. Bien entendu, elle qui a déjà le plus beau des maris refuse aussi sec.

L’empereur en prend ombrage, surtout que la belle vient de lui filer la te-hon de sa vie en tenant tête aux cinquante des plus grands savants de l’époque, démontant une à une toutes leurs belles théories philosophiques. Pour les punir d’avoir été aussi crétins, Maximinus les flanque tous au bûcher, ce qui égaye la fin de son banquet.

"Décidément", se dit-il, "on ne doit pas s’ennuyer avec cette fille !" et il lui demande encore une fois de l’épouser. Comme Catherine une nouvelle fois refuse, il la fait jeter dans un cachot avec interdiction de lui donner à manger. Elle s’en fiche pas mal vu que son mari, sous forme d’une colombe blanche, lui apporte chaque jour de quoi se sustenter, graines et autre ver de terre (ce qui lui permet de garder la ligne).

Faustina, impératrice de son état, fort curieuse de voir de plus près celle qui a tenu tête à son mari, décide de rendre une petite visite à la jeune fille. Au moment où elle pénètre dans le cachot, elle est éblouie par le visage resplendissant comme un soleil de Catherine. Le coeur de Faustina se brise en mille morceaux devant tant de splendeur et elle va crier grâce chez l’empereur son mari.

Las ! Le bougre a un caractère de cochon et en guise de réponse, il l'envoie se faire décapiter, après quoi il ordonne qu’on fasse subir à Catherine le supplice de la roue, joyeuseté qui consiste à faire rouler ladite roue garnie de pointes de fer sur le corps tendre de la jeune fille.

"Même pas mal !" s’exclame Catherine en faisant exploser la machine par toute la force qui est en elle.

Fort contrit, l’empereur lui fait couper la tête, et de la blessure, à la place de sang, du lait jaillit.

"Je l'ai échappé belle !", se dit Maximinus en se demandant quel genre de petits Maximachins lui aurait fait une fille ayant du lait qui lui coule dans les veines ..

 

17 septembre 2016

Un cactus géant

"Temps perturbé, instable, on peut même craindre une petite dépression pour le week-end". Ah ça, pour être synchrone, la présentatrice météo elle est synchrone!!! Aujourd'hui, 14 février, mon mec m’a quittée. Pourtant c’est un samedi comme les autres, un de ces samedis qu’on passait ensemble et où je me blottissais contre lui entre une balade au grand air et une sieste câlinante. Oui, mais. Oui, mais ce samedi 14 février - jour de la St Valentin, un comble! – mon mec m’a quittée. Enfin plus exactement il m’a quittée hier, vendredi 13 !

Ça s’est passé bêtement, remarquez ces choses-là c’est toujours bête quand ça arrive! Il m’avait laissée sans nouvelles toute la semaine, ce qui était inhabituel vu notre relation naissante. Alors quand il m’a rappelée pour me dire qu’il avait quelque chose à me dire, j’étais prête à tout entendre, qu’il a une femme, trois maîtresses, qu’il est bi ou sous surveillance psy, que sais-je encore? Arrivé là rien, il est charmant comme d’habitude, nous passons une soirée délicieuse, c’est un homme exquis, il me plaît affreusement.. Mais – il y a toujours un mais – la fin de la soirée arrive et avec elle le temps des aveux, alors je vous laisse apprécier :

1- il a enfin largué son ex (ah bon, il avait une ex ?) mais il est avec une autre fille (je m’attendais à tout sauf à ça),

2- c’est pour ça qu’il a hésité avant de me rappeler, car le pauvre chéri ne sait plus où il en est (et moi donc !!),

3- il veut quitter cette fille (excellente idée !) mais c’est si dur, ô si dur (il veut quoi ? que je le plaigne ?),

4- la pauvre ne s’y attend pas du tout (moi non plus je ne m’y attends pas du tout !!),

5- last but not least, il ne sait pas trop si lui et moi on peut vivre un truc ensemble alors du coup il hésite (donc, quant il disait qu’il passerait sa vie à m’embrasser, c’était pour meubler ?).

En tout cas ce qui est sûr c’est que moi je ne suis pas partageuse ! Alors là, la super, super conne (moi), elle dit : "Notre amour mérite mieux, réfléchis, fais ton choix, c’est elle ou moi !". Bilan il l’a fait son choix ! Le problème avec les hommes c’est qu’ils font jamais les bons choix !! Pas glop, re pas glop, Hiroshima pas glop !!!!

Depuis cette soirée maudite mon cœur s’est brisé 825 fois, j’ai mis la télécommande dans le frigo et les radis dans l’armoire, j’ai oublié de manger et je me suis acheté des clopes parce que j’avais aussi oublié que je ne fume plus !! J’ai bougé les meubles, vidé les placards, déchiré les rideaux, j’ai pleuré toutes les larmes de mon corps, j’ai classé, jeté, piétiné tout ce qui me faisait penser à lui. J’ai eu l’impression de gravir 1686 fois les montagnes les plus abruptes et d’étouffer dans une apnée sans fin. Je me suis écroulée d’épuisement 666 fois sur le sol en me demandant pourquoi ?? PourquooOoâââ ?????? Pourquoi il m’appelle plus ??? Pourquoi il continue sa vie comme si de rien n’était ?? J’en fais quoi, moi, de cet amour énorme qu’il me laisse sur les bras ??

J’ai enfilé ma petite robe noire, celle qu’il m’enlevait plus vite que son ombre, j’ai sifflé un magnum de Champagne, moi qui ne bois jamais ! J’ai mis la chanson "Toi + moi" à fond en braillant par-dessus, que même les voisins s’en souviennent. J’ai dégobillé tout mon Champ’ dans les toilettes tandis qu’un article ["Chagrin d’amour : la détox"] me narguait!! Alors je l’ai lacéré avec mes ongles vernis pour lui!!!!

Cette fichue St Valentin n’en finira jamais, j’ai mal, tout me fait mal, ma vie n’est qu’un cactus géant entouré d’oiseaux inhumains qui chantent bêtement !!!

Purée de St Valentin, je ne veux plus jamais en entendre parler!!

vetemtsboude

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