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Un peu de douceur ..
18 octobre 2021

De très loin

Exercice d'écriture proposé par Le Goût,

avec des phrases très gaies à insérer dans le texte.

 

1959649850

 

 

Ce fut un chagrin désordonné : après la mort de ma mère, je traversai une période où je revécus toute mon enfance en rêve. Je passais toutes mes nuits en larmes, avec la trouille au ventre. Cette plaisanterie a duré environ deux ans.

J’ai toujours mis la douceur plus haut que tout. J'étais une petite fille douce et câline, et cette petite fille qui croit que la douceur c’est toute la vie, elle n’a jamais grandi. Chaque fois que j’ai aimé, au nom de cette è-('è_çè(hgjd de douceur j’imaginais toujours qu'en étant douce tout se passerait toujours bien. Tiens chéri, prends le pouvoir ! prends, CADEAU ! prends tout ! sers-toi !

J’ai adhéré aux suspicions, intrusions, manipulations, harcèlements, aux rondes des surveillances, interrogatoires, culpabilisations, justifications, justifier tout, même s’il n’y avait rien à justifier. Jusqu’à mes pensées, "À quoi tu penses ? À qui tu penses ?".

Je n’existais pas, la relation exclusive prenait toute la place, voilà, exactement comme quand j’étais petite. C’était confortable, au moins un terrain connu ! rentrer dans ce jeu me permettait de ne pas assumer ce que j’avais envie, ou peur, de vivre.

J'ai toujours dit que "l’homme" ne me parlait pas, ou qu’il me parlait "trop" (ce qui revient tout à fait au même) mais moi non plus je ne lui parlais pas. Parce que je me sentais petite, parce que j‘avais peur, peur qu’il crie, qu’il juge, qu’il interprète, qu’il se mette dans des colères terribles, les mêmes que celles de mon père.

"Tu n'as qu'un droit, celui de te taire".

Je n'ai jamais eu de communication avec un homme dans le cadre d'une relation dite amoureuse. La "communication" était à sens unique, le sien, c’est en tout cas ce que je me suis dit très longtemps, jusqu’à ce que je réalise qu’en réalité, il y avait son sens à lui, l’exclusif, et il y avait mon sens à moi, l’exclusée. Car j’aimais ça, être "à lui", complètement "à lui". Ça m’enveloppait, je retrouvais la relation à mon père qui contrôlait tout.

Un jour, l'espoir changea de camp, le combat changea d'âme.

C'était il y a longtemps, dix ans peut-être. J'ai poussé un cri, un long cri, un cri d’animal. Une terreur glaciale me prenait à la gorge. Maman ne pouvait pas être partie, elle ne pouvait pas m'avoir abandonnée.

Pas encore.

Pas à jamais.

Plus d'espoir.  

Je me rappelle j’étais dans ma chambre et la fenêtre était ouverte. Je ne sais pas le temps qu'a duré ce cri, je sais seulement qu'il venait de très loin, de très profond. Rétrospectivement je me demande ce qu’ont bien pu penser les voisins, sûrement que j’avais mal, mais en même temps c’était ça, j’avais mal et aucun mot à ma disposition pour dire de quoi.

Aujourd’hui, on entend beaucoup parler de la seule fidélité qu’on se doit et qui est la fidélité à soi-même. C’est une belle phrase même si à ce moment-là, je ne voyais pas trop ce que ça voulait dire. Ça avait l’air sympa, la fidélité à soi, comme le centre d'un combat, point obscur où tressaille la mêlée, effroyable et vivante broussaille. Une mêlée qui, enfin, me donnait une réponse : si j'avais tout raté, ce n'était pas, comme les hommes me le suggéraient, parce que j'étais nulle et complètement idiote.

C'est seulement parce que je m'étais trompée de chemin.

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Commentaires
E
Ton texte est déchirant. J'ai eu la chance d'avoir un mari formidable, nous sommes restés ensemble de 1973 à 2017, il y aura 4 ans le 19 novembre qu'il est décédé. Pas facile de trouver l'âme soeur. Bisous et bonne journée.
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L
"Nul ne guérit de son enfance" chantait Jean Ferrat. Mais il est permis de se soigner. Histoire de devenir soi plutôt que ce que les autres, parents, amours, amants veulent qu'on soit, et il n'y a pas d'âge pour ça. Pas d'âge pour se libérer de tout ce qui pèse et qui cloue au sol, tout ce qui réduit l'identité, pas d'âge pour enfin déployer ses ailes de liberté, s'offrir le plaisir de faire la roue comme un paon au soleil, compter ses plumes et les regarder dans les yeux ♥<br /> <br /> Pas d'âge parce qu'il n'y a pas de mode d'emploi, on fait chacune comme on peut avec les moyens qu'on a, et ce n'est pas toujours facile de les adapter à ses rêves. On bricole, on invente, on se débrouille. Ça prend du temps. Et tant pis si parfois ça déraille, s'il y a des fuites dans la toiture, au moins elle est jolie, au moins elle est à soi. Vraiment. Et ça, ça ne s'appelle pas "avoir tout rater", c'est même tout le contraire.<br /> <br /> ♥♥♥
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A
Tu exposes de manière excellente comment la relation fusionnelle (je me perds dans l'autre) s'installe avec ses origines dans sa propre histoire, tenant généralement à une domination paternelle impossible à transgresser tant elle est prégnante. La domination réussit d'autant mieux qu'elle ne s'accompagne pas de violence « visible et/ou identifiable » juste une pression constante incessante et quotidienne. Que ce soit dans son histoire ou dans le présent.<br /> <br /> Parfois on entend dans les couples fusionnels la femme dire : — nous sommes toujours d'accord c'est super. En réalité c'est uniquement l'homme qui pense : elle m'obéit tout le temps c'est super !<br /> <br /> Ce qui est souvent tragique est qu'on trouve de grands bénéfices secondaires à suivre et ne rien décider ni par soi-même ni pour soi-même.<br /> <br /> Jusqu'au « jour du cri » (que d'aucuns appellent primal) que tu indiques très bien.<br /> <br /> La force du cri primal ouvre le temps de la libération.
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H
J'ai eu vraiment mal au coeur pour toi, tu as donné trop de pouvoir aux hommes, eux aussi, ils ont la trouille et eux aussi, ils pleurent leur mère.
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L
C'est parce que, comme beaucoup, tu as été persuadée -à tort- que l'amour s'est s'abandonner à quelqu'un.<br /> <br /> C'est une erreur funeste.<br /> <br /> Non qu'on soit parfait, l'un ou l'autre, des fois on est juste complètement con...<br /> <br /> Mais c'est qu'on n'a pas compris que l'amour, ce n'est même pas un échange (qui implique déjà l'idée de transaction) c'est une affaire de don et de partage.<br /> <br /> Pas une affaire de troc ni une forme d'esclavage.<br /> <br /> L'exclusivité, c'est bien mais c'est d'abord une histoire de confiance, pas un roman d'espionnage.<br /> <br /> Bref, tu t'es fait avoir.<br /> <br /> Mais l'essentiel est que tu finisses par vaincre ta solitude et que tu "partageras" ta vie avec quelqu'un qui "partagera" lui (ou elle) aussi sa vie avec toi.<br /> <br /> Être fidèle à soi-même, c'est être d'accord avec quelqu'un qui pense comme toi, autant dire que ça n'apporte rien.<br /> <br /> Ne pas se laisser bouffer et avoir un minimum de confiance en soi, c'est une autre approche.<br /> <br /> On en gagne pas à tous les coups mais pousser ceux qui veulent t'emmerder à se dire "je vais gagner parce que je suis le plus fort, mais je vais y laisser des plumes ." le poussera à y regarder à deux fois avant de t'attaquer...<br /> <br /> Tu n'as donc pas retenu tout ce que tu aurais dû retenir de ton séjour en internat, où "struggle for life" était la règle dans ceux que j'ai connus...
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E
Ma mère disait que le mariage était une loterie ... force est de constater que le bon numéro ne sort pas toutes les fois. J'ai gagné à la loterie en aout 1969 lorsque j'ai rencontré mon mari.<br /> <br /> Ton récit est poignant.<br /> <br /> bises de réconfort
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G
C'est avec ma mère que j'ai vécu cela ! Mon mari a été un cadeau du ciel
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A
terrible témoignage, et si reconnaissable!
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P
Encore un texte fort, émouvant, sincère.<br /> <br /> Contrairement à toi, j'ai eu l'immense chance de croiser sur ma route un homme doux et aimant, fidèle, attentif, bon mari, bon papa... il me fallait bien tout ça.<br /> <br /> Gros bisous ma Solaire ♥
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D
Se tromper de chemin, c'est difficile de savoir lequel est le bon, comme tu le dis, celui qu'on nous a montré prévaut souvent sur les autres. Si on pouvait on le referait bien à l'envers des fois, de façon à en prendre un autre. Sauf qu'on ne sait pas non plus si ce serait encore le bon. Sois toi même, les gens qui te côtoient t'on choisie c'est pas pour des prunes... Bisous et reprends courage. Un jour n'est pas l'autre.
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F
J’ai beau avoir ce qu’on appelle du caractère, je me retrouve dans tes relations avec les hommes…<br /> <br /> Longtemps j’ai été « piétinée «  de peur d’être quittée…<br /> <br /> Se tromper de chemin est fréquent lorsque l’exemple masculin côtoyé dans notre enfance n’a pas été au top…<br /> <br /> Je t’embrasse fort.
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