Folle de joie!
Séduite et inspirée par le post de Pivoine sur les années en 9.
Dans la pénombre, immense comme la mer, un jeté de lit bois de rose, avec assise dessus, une magnifique poupée de porcelaine. C’est la chambre des parents de mon père, qu’ils ont cédée à ma mère et moi bébé (mon père était en Algérie), puis à mes parents jusqu’à ce que, en 1959, les auteurs de mes jours obtiennent enfin un logement bien à eux. C’est un de mes plus vieux souvenirs.
La maison dont je parle n’existe plus, elle a été démolie. Elle se situait dans une rue très vivante d’Ermont, la rue de Stalingrad, où mes grands-parents avaient acheté un fonds de commerce de teinturerie avant la guerre. Bien leur en prit, car quand mon grand-père a été mobilisé, c’est ce qui a permis à ma grand-mère de s’en sortir avec ses deux fils. Elle travaillait 22h sur 24, disait-elle
J’adorais cette maison, "la vieille maison", comme je l’appelais. On entrait par la boutique, où ma grand-mère recevait ses clientes. Dans la vitrine, des robes de communiantes fraîchement amidonnées et repassées attendaient sagement qu’on vienne les chercher. Derrière, se trouvait l’arrière-boutique avec deux grandes tables à repasser (avec panière prévue pour mettre le linge et où Mamy mettait mon père bébé pendant qu’elle repassait). Une table pour Mamy, une pour son employée dont le fils, Dominique, plus vieux que moi, a été mon premier compagnon de jeu.
Au-dessus on accédait par un escalier à un petit logement composé d’une chambre, une cuisine, une salle à manger avec un divan et une grosse télé noir et blanc.
Il y avait aussi le piano de mon père.Mon oncle m’appelait "Nounours". En effet, j’étais une petite fille sensible et craintive, or les hommes de ma famille avaient une très grosse voix, parlaient fort, se criaient souvent dessus en évoquant des scènes terrifiantes de la période où mon grand-père était revenu de la guerre. Leurs cris me faisaient peur, je pleurais et me renfrognais.
1959, c’est l’année où, grâce aux interventions de ma grand-mère qui était une commerçante très appréciée et très influente d'Ermont, mes parents ont enfin obtenu un appartement HLM, un deux-pièces pour cinq : Maman était folle de joie d'être enfin chez elle !
Et pour vous?